J’étirais longuement mes pattes duveteuses, tant et si bien qu’un frisson me parcouru. Mon épaisse fourrure claire capta les derniers rayons brûlants de la journée. Je savourais les caresses chatoyantes de l’astre. Quelle belle journée..., songeais-je paresseusement, avec un sourire satisfait. Une de plus. Je m’allongeais sur le sol, avant de rouler sur le dos à la manière d’un chaton, et de frapper l’air d’une patte. Le ciel mourant se recouvrait de rose. Des bris d’herbes vinrent chatouiller ma peau. Le ventre plein d’un lapin avalé un peu plus tôt, je soupirais d’aise. La vie est un paradis ! Mon regard farfouillas le camp dans lequel je me reposais depuis le retour de l’entraînement.

J’avais toujours eu de la chance. J’étais né sur la plaine. Où, du moins, on m’y avait trouvé, pauvre chaton pleurant sa faim. Le Clan de la Petite Brise avant longuement hésite, avant de se décider à me confier aux Reines. Plusieurs d’entre elles prirent soin de moi tour à tour, si bien que j’ai « plusieurs Mamans ». N’est-ce pas une chance inestimable ? Je ne connaîtrais probablement jamais celle et celui qui m’ont infante, ni dans quel but, et pourquoi ils m’ont abandonné. Mais, en échange, j’ai plus de Mamans que quiconque. Et je ne suis pas de ceux qui disent que seul les liens de sangs peuvent être des plus forts et intenses. J’aime chacune de mes Mamans de tout mon cœur, et elle me rassure toutes à leur manière. Ainsi, je n’hésite jamais à me vanter que j’ai plusieurs Mamans. Et beaucoup de frère et sœurs, aussi ! Ça va avec, n’oubliez pas ! Et oui, j’ai une famille nombreuse... Une bénédiction dans ce monde où les guerres sont monnaies courantes. Bien que la paix se soit enfin installée, et que les chats disent qu’elle va durer ! Moi, j’y crois dur comme fer... Il n’y a plus personne comme cette Nuage Sanglant, aujourd’hui. C’est triste à dire mais c’est une bonne chose quand des êtres comme elle meurent.

Et donc, moi, l’enfant de la plaine et des collines, j’ai était élevé comme n’importe quel chaton du Clan de la Petite Brise. Depuis quelques jours, enfin, j’ai eu droit à mon Baptême d’Apprenti. J’avais si hâte ! Mes Mamans étaient fières de moi. Tous le monde criait « Nuage de l’Aube ! Nuage de l’Aube ! » avec un sourire grand comme ça ! C’était un très beau jour, où le vent soufflait fort. On voyait les coquelicots dodeliner de la tête un peu partout. Et parfois, leurs pétales fin et doux se décollaient du cœur pour venir rejoindre le ciel déjà plein de pollen. Le vent leur faisait jouer de beaux spectacles. C’était magnifique. L’air de la plaine était plein de plantes. Le soleil brillait au dessus de nos têtes. Que demander de plus ? À présent, il ne me reste plus qu’à faire mes preuves. Je n’ai pu que nettoyer les litières des Anciens pour le moment, mais ça ne me gêne pas : j’ai pu me rendre utile ! De plus, leur histoire était intéressante. Et puis, c’était plus difficile que je le pensais : si on s’y prend mal, la mousse n’est pas douce du tout. Elle est pleine de terre. Alors je me suis fait la promesse de faire encore plus attention, les prochaines fois. Si je fais bien mon travail, ils dormiront mieux. C’est ma petite façon de contribuer au Clan, en tant qu’Apprenti. Et je suis heureux de cette vie. Pour moi, elle est comme lorsque je rêve. Car je ne rêve que de la plaine, et de mon Clan.